LE CLUB DES ACTEURS DE LA PERFORMANCE PUBLIQUE

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Intériale est une mutuelle créée par et pour les agents de la Fonction Publique.

Elle est née en 2008 de la fusion de trois mutuelles de la Fonction Publique. Son Conseil d’administration est - à l’image de ses adhérents - composé d’hommes et de femmes issus des collectivités territoriales, de la Police Nationale, de l’Administration centrale et des Préfectures.

Intériale couvre les agents de la Fonction Publique Territoriale, des ministères de l'Intérieur, des Armées, de la Justice et de l'Éducation Nationale.

À ce titre, la mutuelle dispose d'une connaissance pointue des fonctions, des environnements et des risques professionnels de celles et ceux qu'elle protège au quotidien, dans leur grande diversité de métiers.

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Chers candidats à la présidentielle, il n'y aura pas de paix sociale tant que vous laisserez les policiers à leur détresse

Le flic, on ne l’embrasse plus; on l’insulte, on lui crache à la figure, on l’immole.

Tribune publiée dans le Huffington Post le 22.03.2017

Mesdames, Messieurs,

Vous vous en souvenez sans doute. C'était en 2016. Il y a une éternité. Renaud chantait:"J'ai embrassé un flic / Entre Nation et République / J'aurais pas cru y'a trente ans / Qu'aulieu de leur balancer / Des pavés à tour de bras / J'en serrerais un contre moi." Comme lui, comme vous, des millions de Français témoignaient leur reconnaissance à la police, à leur police. Et il y avait de quoi: depuis des mois, en effet, qu'ils soient policiers nationaux ou policiers municipaux, ils déclinaient toute la palette de l'engagement au service de la République, des patrouilles sans repos jusqu'au sacrifice suprême. Charlie Hebdo, le Bataclan, Magnanville, Nice... Autant de traumatismes inédits. 
Mais ce qui s'est produit ensuite, l'avez-vous perçu? Tout à coup, à peine le souvenir du baiser s'était-il estompé, un regard en coin; puis une insulte; puis un pavé. Et, pour finir, un cocktail Molotov, comme le 8 octobre dernier à Viry-Châtillon, ou il y a quelques jours encore à Mantes-la-Jolie, aux Ulis, à Asnières, à Drancy, à Bobigny, à Argenteuil, à Ajaccio. Ayez, Mesdames, Messieurs, la curiosité de taper "Police" et "Molotov" dans Google Actualités; sans doute serez-vous, comme moi, saisi d'effroi, car la liste est longue...

Le flic, on ne l'embrasse plus; on l'insulte, on lui crache à la figure, on l'immole. Bien sûr, ceux qui insultent, qui crachent, qui immolent, ne sont pas les mêmes que ceux qui embrassaient –et qui continuent à embrasser. Ce sont les professionnels de la haine antiflics qui sont sortis du silence où l'émoi populaire les avait, un temps, confiné. Aujourd'hui, tout leur est profitable pour instiller le doute, la méfiance, le rejet. Et l'amalgame, surtout. Dès qu'une affaire éclate, une double mécanique s'enclenche. D'abord, on simplifie les faits à outrance, quitte à "s'arranger" avec la vérité. Et ensuite, sans distinction ni précaution, on jette le discrédit sur l'ensemble de la profession.

Quel que soit le métier, cette mécanique est mortifère. Vous en savez quelque chose car elle s'applique souvent aux responsables politiques. Et d'ailleurs, on pourrait associer à la détresse des policiers celle de tous les agents de l'Etat et des collectivités territoriales confrontés sur le terrain à une haine explicite –les pompiers, par exemple, devenus malgré eux les "soldats du feu social", un feu attisé par les forces du désordre –ou implicite– de l'agent de propreté obligé de réparer la casse provoquée par les "sauvageons" à l'agent d'accueil agressé par des citoyens de plus en plus tendus.
Mais ce processus destructeur l'est à titre spécial lorsqu'il s'applique à une profession sans laquelle il n'est pas de vie sociale paisible, ceux dont la mission est de garder la paix, les bien nommés "gardiens de la paix". Nombreux sont ceux qui, aujourd'hui, ont l'impression d'être coincés dans l'œil du cyclone. A vrai dire, ils n'attendent pas un hypothétique "retour des baisers". Simplement, une main tendue, une oreille qui écoute, une voix qui leur parle seraient bien suffisants. Peut-être les vôtres, qui sait?

Car en ce moment, ils appellent à l'aide. Certains hurlent, même. Les services d'assistance psychologique qui les accompagnent au quotidien, ceux du ministère comme ceux des organismes de protection sociale, en savent quelque chose. Ils agissent main dans la main, déployant ensemble des trésors de disponibilité, mais la vague est difficile à contenir. Depuis quelques semaines, on ne compte plus les alertes et signaux de détresse: burn out, dépressions, suicides... La dérive s'accélère, au rythme des agressions dont les policiers font l'objet, lesquelles se multiplient sans que l'on s'en émeuve outre mesure.

En 1789, lorsque fut abolie la lieutenance générale de police, funeste instrument de l'arbitraire royal, les Français découvrirent que les forces de l'ordre pouvaient être à leur service, que la police pouvait être pour eux et non contre eux, qu'elle devait être gardienne de la liberté. Les policiers ne sont pas parfaits et ne le seront jamais. Dans toutes les institutions, dans toutes les corporations, on trouve l'infinie diversité des profils humains et la police n'échappe pas à la règle.
Mais en laissant dépérir ses policiers, eux spécialement, c'est sa liberté que la France laisse mourir à petit feu.

Avec l'expression de mon profond respect.

Pascal Beaubat
Président de la mutuelle Intériale, mutuelle de la police et des collectivités territoriales

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